Chaque année, depuis 7 ans, le Club des Annonceurs interroge une trentaine de dirigeant(e)s de marques influentes, quant aux grands enjeux auxquels ils/elles sont confrontés dans leur métier. De ces interviews “qualitatives” et des données “quantitatives” fournies par Kantar Insights, partenaire de l’étude tout comme INfluencia, le Club des annonceurs identifie les tendances et courants saillants autour d’un thème. Cette année la question était : “How much is Enough ?”. Découverte cette semaine des deux premiers courants.
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Cette question de “ce qui est assez”, nous nous la posons tous à l’aune de l’atteinte des limites planétaires, face aux risques géopolitiques, sanitaires, face aux crises énergétiques et économiques. Comment les entreprises peuvent-elles réintroduire de la mesure, questionner l’essentiel, recentrer leurs activités pour déjouer l’hubris et « contenir les dégâts associés au dérèglement climatique » comme l’a rappelé Fabrice Bonnifet, Président du Club des Directeurs du Développement Durable « en passant d’une sobriété subie à une sobriété choisie »
A travers cette étude, le Club des Annonceurs a enquêté sur les modalités d’une plus grande sobriété dans les métiers de la Marque. Il a échangé avec des professionnels en pleine transformation de leur activité. Il a rencontré des entrepreneurs qui ont placé les limites planétaires au cœur de leur modèle d’affaires. Il a écouté ceux qui ont des solutions à proposer. Et il a identifié 4 courants qui ouvrent la voie à un nouveau paradigme business, qui aspire à une sobriété désirable et désirée.
Désirée, car selon les résultats d’une enquête complémentaire et exclusive menée par Kantar Insights pour le Club des Annonceurs auprès de 1000 personnes pour prendre en compte l’avis des citoyens français dans la synthèse de l’étude The Brand Immersion, 79% des consommateurs sont favorables à plus de sobriété. Elle représente pour 48% d’entre eux l’opportunité de bâtir un futur plus optimiste, et constitue une nécessité pour 31% des personnes interrogées. Seulement 21% de la population ne souhaite pas ou ne peut pas aller vers plus de sobriété. Pour 55% des Français la sobriété est réalisable et 59 % estiment que l’on ne se transforme pas assez vite vers une société plus sobre ! Le message est entendu. Voici quelques pistes pour accélérer.
Courant 1
#La sobriété technologique
La population se divise à part égale sur les mesures à prendre pour être plus sobre. Une première moitié (49%) est prête à un changement, en consommant moins, en renonçant à certaines habitudes, en faisant autrement. D’autres éléments nous montrent que le tiers des Français attend même qu’on limite la valorisation du superficiel, la promotion de la consommation comme source de bonheur et les dérives de la mondialisation. Il s’agit pour eux d’inventer une nouvelle manière de faire société. L’autre moitié (51%), est plutôt dans une démarche d’optimisation. Et la technologie peut être très utile pour qui souhaite optimiser.
L’idée n’est pas de valoriser le solutionnisme technologique, même si le monde actuel y pousse forcément : il ne fait qu’ajouter, au lieu d’aider à réduire (c’est le célèbre paradoxe de Jevons). Ce qui nous intéresse cependant, ce sont les low tech, l’innovation et les technologies qui se mettent au service d’une réelle réduction de la consommation d’énergie et de ressources.
#Lean Tech (la tech sans gras)
C’est aussi l’ensemble du parcours du produit ou du service qui doit être questionné pour plus de sobriété. Il est possible de s’inspirer de la logique e-commerce, qui favorise la recherche d’une économie de matière (produit le plus léger possible) pour faire des économies de coût (le coût de livraison augmente avec le poids du produit). C’est le cas de We Spring dont les produits d’entretien efficaces et clean sont le fruit de la recherche d’un moindre poids et d’un moindre coût (ultra fins, ils se glissent dans le circuit de livraison classique du courrier). Ou celui de Critéo, dont le cœur de la technologie est de diffuser moins pour diffuser mieux selon Grégoire Bruni, Head of agencies « The lesser the better ».
#Sufficiency Tech
Les marques peuvent aussi aider à construire de nouveaux imaginaires autour de la sobriété. Nous avons tous vu le concept car Oli de Citroën qui dit stop à la tech pour la tech – un trait fortement ancré dans l’automobile – et revient aux fondamentaux de ce qu’est une voiture, avec juste ce qu’il faut d’avancées technologiques, pour en faire un véhicule d’une grande sobriété. En cassant les codes avec son concept-car, la marque prépare les esprits à une nouvelle génération de véhicules électriques.
Pour résumer ce premier courant, l’enjeu pour les entreprises est de rendre plus sobres en énergie et en ressources leur technologie ; et pour les marques d’accompagner les usages et les imaginaires pour une meilleure acceptation d’un progrès qui doit être mis avant tout au service de la Nature.
Courant 2
#la sobriété incrémentale
Selon l’enquête consommateurs précitée, la sobriété implique un changement de style de vie mais pas une régression. L’immense majorité des personnes sondées (91%) estime qu’il s’agit de renoncer au superflu et de moins centrer nos styles de vie autour de la consommation. La sobriété doit porter des valeurs positives. Pour deux-tiers environ de la population, il ne faut pas que la sobriété revête les atours négatifs d’une régression, d’une décroissance, de privations. La question des produits sous emballage plastique est également centrale dans la volonté d’adaptation.
Du côté des entreprises, les pénuries avérées ou à venir de certaines ressources (ingrédients clés dans l’alimentaire ou la cosmétique ; minerais pour la technologie, etc…) conduisent les entreprises à adapter leurs offres (nouvelles recettes, nouvelles formulations) et repenser le cycle de vie des produits (reconditionner les téléphones plutôt que les détruire). Par ailleurs, les nouvelles réglementations visant la moindre consommation des ressources, notamment celles des emballages plastiques à usage unique, conduisent des transformations profondes des chaînes de production, de distribution et d’utilisation des produits.
Les marques sont contraintes de repenser leurs assets traditionnels pour adopter des comportements plus sobres. Au-delà du produit, ce sont tous les signifiants des marques qui doivent évoluer : packaging, distribution, communication, etc…Tout en gardant à l’esprit qu’elles doivent préserver ce qui fait le sel de la relation client : l’expérience et le confort. Une gageure qu’elles peuvent relever en misant sur la créativité et la qualité.
#Longlife experience
Pour répondre à la fin du recours au plastique à usage unique, McDonald’s déploie dans ses restaurants l’usage de vaisselle réutilisable. Une révolution pour la marque qui doit bousculer des piliers sur lesquels l’expérience client et la fabrication produits sont fondées. Mais cela a été très bien accueilli par la clientèle !
Cette notion d’expérience améliorée est partagée par Cécile Chambaudrie, présidente de NRJ Global, pour qui “la sobriété peut être désirable quand elle apporte une nouvelle relation vertueuse et qu’elle devient un progrès”. Pour Sylvia Tassan-Toffola, directrice de TF1 Pub, “l’innovation et la créativité seront nos meilleures alliées pour démontrer notre capacité à agir pour la transition écologique”
#No packaging challenge
L’over-packaging est une des préoccupations majeures des consommateurs Français. La Loi Agec et la Loi Climat et Résilience incitent fortement les marques et distributeurs à revoir leurs pratiques. D’ici à 2030 les magasins de plus de 400 m2 devront dédier au moins 20% de leurs surfaces à la vente en vrac. Ainsi Franprix teste le vrac avec les grandes marques nationales sous la bannière : « Moins Emballées, Plus Responsables » afin de sensibiliser et encourager les consommateurs à des comportements plus vertueux.
#Inflation Positive Impact
L’inflation galopante pousse également les marques à plus de sobriété dans la consommation de leurs ressources : elles sourcent plus local, et font la chasse au gaspillage dans cette période où acheter et acheminer des matières premières coûte plus cher. Un spécialiste du bio nous a par ailleurs confié que l’inflation était moins forte pour les produits bio et les produits éco-responsables : ces marques étant plus attentives aux modes de production et de transports, elles sont moins impactées par la flambée des coûts des matières et de l’énergie. Autre tendance forte : les marques jouent à plein la carte du reconditionné et de la réparation, comme Fnac Darty qui a lancé un abonnement réparation à partir de 9€/mois et qui forme massivement ses équipes à la « seconde vie ».
Ainsi les marques font de la transformation et de la sobriété un sujet positif pour elles et pour leurs clients. Elles combinent recherche d’impact et priorité business, par une stratégie d’adaptation qui ne se fait pas au détriment de la consommation et du confort, tout en générant des économies conséquentes post investissements.
Cet article a été publié sur INfluencia https://www.influencia.net/les-marques-les-francais-et-la-sobriete-optimiser-ou-changer-episode-1/
Rendez-vous la semaine prochaine pour découvrir les deux derniers courants révélés par l’étude.